Dimanche après-midi, Félix Tshisekedi lance sa campagne à Kinshasa. Et c'est au stade des martyrs que le président sortant veut exécuter sa démonstration de force. Les responsables de la plate-forme présidentielle Union Sacrée et le parti présidentiel UDPS ont été mis à large contribution. On ne fait pas dans la dentelle. Une enveloppe de 5 millions USD a été libérée pour remplir le stade de 80.000 places.
"La fois dernière, lors de la sortie de l'Union Sacrée, nous devions recevoir 30 USD, on ne nous a donné que 10.000 francs, à peine 4 dollars", déclare Philomène Nseka. "C'est chaque fois le même chose, on nous roule et nous n'avons même pas assez pour prendre le transport et rentrer à la maison", se plaint la déléguée venue de Kimbanseke.
A Limete, c'est la même tension. Tout le monde se rappelle le fiasco de la sortie officielle de l'Union Sacrée du 29 avril dernier. La population venue nombreuse à l'invitation des centaines de partis politiques membres de la plate-forme présidentielle était repartie en quelques minutes faute de recevoir le pécule annoncé de 50.000 francs par personne.
"Cette fois, pas question que nous allions au stade sans avoir l'argent. On nous a dit que nous allons recevoir chacun 50 Usd. Si on ne voit rien, on ne montera pas dans les bus qu'on nous a affrétés", affirme un des responsables de quartier de l'Union Sacrée.
« On ne vit pas de promesse »
La campagne présidentielle démarre donc sous la menace des membres des partis de la majorité. Faute d'avoir bénéficié des retombées d'un régime de plus en plus mégalomaniaque, les populations ne veulent plus se contenter de promesse. La majorité des Kinois vivent avec moins de 2 USD/jour. Les meetings de Félix Tshisekedi sont l'occasion d'assurer au foyer quelques jours de provisions. Raison pour laquelle, chaque bain de foule sera payé rubis sur ongle par les hommes du Chef de l'Etat.
Fayulu, une candidature qui pose question
Ce même dimanche 19 novembre, Martin Fayulu, le candidat de l'opposition LAMUKA, est attendu à Bandundu-Ville. C'est dans la capitale provinciale de sa région d'origine que le grand perdant des élections de 2018 va s'élancer à la conquête des électeurs congolais. Risque zéro pour le démarrage d'une campagne électorale qui risque d'être longue et laborieuse pour Martin Fayulu.
Cette fois, il n'aura pas le soutien de Jean-Pierre Bemba ni celui de Moïse Katumbi. L'homme joue en solitaire. La rumeur veut qu'après avoir boycotté le processus, le grand retour de Fayulu aurait été négocié avec Félix Tshisekedi. Le Chef de l'Etat congolais veut d'une part empêcher toute coalition de l'opposition autour de son principal adversaire, Moïse Katumbi, et d'autre part donner les allures de crédibilité à une élection présidentielle déjà entachée de beaucoup d'irrégularités.
Le président sortant a toutes les raisons de se réjouir de la volte-face de Martin Fayulu qui ne dispose d'aucun candidat aux élections législatives et provinciales. L'autoritaire opposant avait interdit à son parti ECIDE de déposer les listes aux scrutins. Comparé à la campagne présidentielle en RDCongo, le tour du monde à la voile en solitaire a toutes les allures d'une promenade de santé.
Rassembler, le défi de Katumbi
L'ancien gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, est quant à lui annoncé à Kisangani pour le lundi 20 novembre. Loin de ses terres natales katangaises, le chef de file pressenti de l'opposition poursuit sa campagne lancée à toute allure dans le pays. Depuis deux mois, le candidat a multiplié les sorties spectaculaires en Equateur, au Kwilu, au Kongo Central, au Tanganyika, et récemment au Maniema. Le patron du TP Mazembe applique à la politique les recettes qui ont fait la renommée de son club de football. Discipline et rigueur. L'organisation de ses déplacements semble professionnel. Les avions et les véhicules sont à disposition. C'est en parfait état de forme que le candidat aborde la dernière ligne droite des élections. Reste pour lui le défi de rassembler les autres candidats de l'opposition autour de sa bannière. La partie est très loin d'être gagnée. D'autant que Martin Fayulu partage avec Félix Tshisekedi le même sentiment d'hostilité à l'endroit de Moïse Katumbi.
Quant aux autres candidats, il se dit que le docteur Mukwege serait attendu à Bukavu dans le Sud Kivu. Désormais, pour le prix Nobel et Delly Sesanga, l'heure du choix est arrivée. Soit, ils se déterminent en faveur d'un candidat commun de l'opposition, soit ils poursuivent. Dans le premier cas, les deux attendent des garanties de Moïse Katumbi, qui dispose des meilleurs atouts pour obtenir le soutien des autres candidats. Soit, s'ils poursuivent, ils doivent mobiliser des ressources financières importantes. Le coût d'une campagne électorale congolaise est évaluée en millions de dollars américains.
Le venin de la rumeur
La rumeur persistante fait état que Martin Fayulu et Delly Sesanga ont obtenu des promesses financières de Félix Tshisekedi pour maintenir leur candidature contre plusieurs millions USD. Quant aux anciens Premiers Ministres Augustin Matata et Adolphe Muzito, ils devraient recourir à leurs fonds propres.
Dans ce contexte, seuls deux candidats vont sillonner le pays. L'un à coup des fonds du Trésor public avec des meetings tarifés à 50 Usd par participant, et l'autre par la mobilisation d'une population impatiente de changement.
Reste un mois avant que sonne la fin de la partie ! Et le coup de sifflet final risque de conduire à des grandes surprises...
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